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Les Voivres : territoire d’expérimentations
Quel est donc le secret de cette commune de 350 habitants qui attire des habitants, préserve son école, rénove le bâtiment ancien au cœur du village, voit la vie touristique fleurir, accueille un festival de la transition et attire les entreprises ? Cela ne relève pas du miracle, mais bien d’une ligne de conduite politique axée sur l’expérimentation qui semble bien faire ses preuves.
Sauvegarder l’école : le défi qui a mis le village en mouvement
Fraichement élu maire en 1989, Michel Fournier a été confronté dès le début de son mandat à un couperet que connaissent de nombreuses communes rurales : l’annonce de la fermeture de l’école. Il n’y avait que 9 élèves inscrits pour la rentrée. Pour que ceci ne soit pas une fatalité, il ne restait qu’une solution : faire venir des familles. Les Voivres n’échappait pas à la tendance d’exode rural, avec 200 maisons inhabitées. L’idée était de faire de ce triste fait, un atout. La municipalité s’est lancée dans un pari fou et a fait annoncer par la presse la promesse à ceux qui viendraient en location, de devenir propriétaire à terme. Une sorte de crédit-bail appliqué au logement.
Ne trouvant pas écho auprès des offices HLM pour prendre en charge la rénovation des logements, c’est la commune qui s’en est chargée. C’est ainsi que les premiers chantiers d’insertion ont eu lieu sur la commune (contrats emploi solidarité), de deux mois pour une vingtaine de personnes. Ce sont d’abord deux familles qui ont été séduites par le dispositif (avec 6 et 5 enfants respectivement). Mais l’éducation nationale ne comptant pas faire marche arrière, le maire n’a pas abandonné le combat, et a menacé d’ouvrir une école privée. La médiatisation de cette histoire eut de l’effet, puisque ce sont plusieurs familles avec 35 enfants supplémentaires qui ont rejoint le village. Renversement de situation, il ne restait que 2 mois pour créer une école maternelle sur le village ! L’afflux des familles s’est emballé (300 demandes), et avec 70 enfants à scolariser, une 3ème classe a dû être ouverte.
Aujourd’hui la commune est propriétaire de 10 logements dits sociaux et d’une quinzaine de maisons.
Après l’attractivité résidentielle, l’attractivité touristique
La commune des Voivres s’illustre par les chantiers d’insertion qu’elle mène. C’est la seule structure du dispositif IAE (Insertion par l’Activité Economique) à avoir le statut de commune. Ce sont 600 personnes qui ont été en contrats d’insertion à la commune (Contrat Emploi Solidarité, Contrat Emploi Consolidé, ou IAE). Aujourd’hui, sur les 21 employés communaux, 14 personnes sont en insertion par l’activité économique et 2 personnes les encadrent.
Et ce ne sont pas les chantiers qui manquent ! Dès 1994, la commune veut réhabiliter l’étang Lallemand. Là encore elle innove. Bien qu’à l’époque le financement participatif n’était pas répandu, ce sont 117 habitants qui contribuent au rachat de l’étang via une Société Civile Immobilière. Le projet marie écologie et économie : associer à l’étang une ferme piscicole pédagogique ainsi qu’un centre d’Education à l’Environnement pour le Développement Durable et hébergement La Maison d’ici.
L’hébergement a bien évolué : camp-marabout devenu camp-palette (des chambres avec une ossature en palettes, encore une innovation qui a réservé bien des difficultés pour l’homologation jeunesse et sport), puis centre d’hébergement.
Michel Fournier et son équipe savent utiliser les bons outils juridiques pour assurer la pérennité des projets : une SCI propriétaire des lieux, qui fait un bail emphytéotique à la commune (habilitée avec ses chantiers d’insertion à faire les travaux), et qui confie la gestion du centre d’accueil à une association créée pour le projet (l’eaudici).
Au final ce sont 2 millions d’euros de travaux qui ont été investis. La gestion du centre d’accueil s’est accompagnée de la création d’emplois jeunes, dont 6 ont été transformés en CDI. Le message du maire était clair : « vous avez 5 ans pour faire votre futur job ». En 1999, la gestion a été transférée à l’ODCVL, organisme national spécialisé (Office Départemental des Centres de Vacances et de Loisirs). La pérennité du projet est assurée, l’eaudici accueillant 10 000 enfants par an.
Le site s’est doté d’un abri qui sert aux colonies, mais aussi à accueillir les fêtes privées ou les fêtes du village, notamment celles organisées par l’association « la transition d’ici ». Ce vaste bâtiment en bois a en fait été construit pour englober les algeco sanitaires (douches et WC) qui avaient été installés pour les camps. Encore une fois à l’époque, cette innovation constructive (ossature bois) ne rentrait pas dans les cases. Qu’importe si le bâtiment a dû être déclaré en bâtiment agricole, ça ne l’empêche pas aujourd’hui d’être un lieu multi-fonctionnel.
Des chantiers, de la vie
Aux Voivres, tout est question d’opportunité. La guinguette du village avait brûlé. 20 ans après, laissée en l’état, la mairie l’a rachetée pour trouver une solution, sans usage prédéfini. Un jeune couple qui venait de finir un tour du monde étaient désireux de s’installer ici. Lui, charpentier de métier, voulait monter une activité de construction de yourtes. Ici on ne manque pas de solution : « on vous prend en chantier d’insertion, vous logez dans la guinguette et vous avez 6 mois pour tout rénover ». Résultat : la guinguette a bien été rénovée, une yourte installée à proximité de ce bâtiment, à mi-chemin entre le village et l’étang Lallemand. Ce lieu est propice aux spectacles, une vie sociale est née, ainsi que l’association « C’est quoi T’sa » qui organise des évènements socio-culturels en tout genre.
Concerts, causeries, festival la Transition d’ici, bibliothèque, sorties nature, artisanat local, pisciculture, les activités ne manquent pas ici. Cette vie sociale a même donné naissance à un projet en gestation, d’habitat groupé en yourtes. A suivre… Toujours est-il que la dynamique de la municipalité est bien accompagnée d’une dynamique citoyenne.
Une couveuse pour porter le développement économique local
Dans le domaine économique aussi Michel Fournier aime donner une chance aux gens qui ont des projets. C’est le principe de la couveuse d’entreprise : aider des entrepreneurs à mettre en place leurs idées, et leur couvrir la prise de risque. Le tout avec un accompagnement comptable et juridique assuré par des spécialistes de la création d'entreprise.
L’opportunité a été de se raccrocher au projet de pôle d’excellence rurale « Structuration de la filière bois-feuillus des Vosges », porté par le PETR Epinal cœur des Vosges. L’enjeu principal est la réorganisation et le développement des performances dans la filière bois à base de feuillus, de hêtre en particulier. Les deux ambitions fortes du pôle d’excellence rural sont la réalisation de chalets touristiques à Xertigny, showroom grandeur nature de l’utilisation du hêtre comme matériau de construction, et d’autre part un atelier de traitement du bois feuillu (thermotraitement) avec atelier de fabrication de mobilier urbain et rural de ce bois à Hadol et Xertigny.
La couveuse voulue par la mairie des Voivres, et la Communauté de Communes Val de Vôge s’intègre parfaitement au pôle d’excellence rurale : rénovation-vitrine utilisant le hêtre, couveuse d’activités innovantes autour du bois feuillu. Le dispositif pôle d’excellence rurale, qui consiste à mener des projets mêlant acteurs publics et privés, est avantageux puisqu’il apporte un financement d’Etat de 50%.
C’est ainsi qu’aux Voivres, la ferme Saint Joseph, ferme des années 1800, aux abords de l’étang Lallemand, est rénovée et transformée pour héberger 8 cellules de travail et des locaux communs, en vue d’en faire un bâtiment vitrine de l’utilisation du hêtre en extérieur et intérieur, tout en « couvant » des entrepreneurs. Le premier appel à projet pour recruter les créateurs d’activité a été lancé au printemps 2017. Ce devrait être 5 projets par an retenus, pour 2 ans maximum. Le bâtiment devrait accueillir également un pôle du réseau ALEXIS-Lorraine, association d’accompagnement aux créateurs d’entreprise et entrepreneurs, complétant leurs implantations (Maxéville, Dieuze, bientôt Etain).
Sans attendre la livraison du bâtiment, cette logique de couveuse a déjà été testée avec 5 jeunes sortis de l’ENSTIB (l’Ecole Nationale Supérieure des Technologies et Industries du Bois) qui ont développé la fabrication de lunettes en bois, skateboard et vélos en bambou. Cette activité est hébergée dans un atelier racheté et mis à disposition par la Communauté de Communes. Quelques années plus tard, l’activité est viable, In’Bô est devenue une société, comprend 7 personnes et développe ses gammes. Et le concept de couveuse a fait ses preuves et entame sa phase de déploiement. Avec pour Michel Fournier la fierté que cela soit décentralisé des pôles urbains, et la certitude que d’investir la ruralité « casse les codes » et est facteur d’innovation. Avec la fusion de la Communauté de Communes Val de Vôge avec la Communauté d’Agglomération d’Epinal, la maison de l’emploi siègera aux Voivres, au sein de la couveuse.
Le soutien au développement économique de la commune concerne également l’agro-écologie. Alors qu’une personne souhaite s’installer en maraîchage bio sur la commune, c’est toute une chaine de solidarité qui se met en place : la commune fournit le foncier et fait aménager les accès à la parcelle par le chantier d’insertion, des habitants font dons de matériel et outillage, la couveuse « Terre d’envol » prodigue des conseils (association d’accompagnement aux porteurs de projets agricoles dans les Vosges, plus particulièrement ceux non issus du milieu agricole). Encore une fois Les Voivres sont terres d’expérimentation de ce dispositif de couveuse agricole.
Toutes ces réalisations poursuivent un but de développement local durable et suivent la devise de son maire qui est persuadé que « dans la vie on a tous besoin d’un coup de pouce (ou de pied !). Au bon moment ». Et Michel Fournier s’attache à ce que la puissance publique ait ce rôle et soit créateur de lien. Toujours innover pour ramener la vie à la ruralité dans ce contexte de tropisme urbain.
Eléments de contexte:
Une commune rurale, qui en 1998 perd des habitants et apprend que son école va fermer
En quelques dates:
1989 la commune attire de nouveaux habitants pour sauver l’école avec un système de location-vente de logement
1994 lancement d’un projet de centre d’éducation à l’environnement avec reprise de l’étang Lallemand
2014 labellisation «pôle d’excellence rurale» au projet «Raison d’Hêtre» qui prévoit l’installation d’une couveuse d’entreprise aux Voivres
Principaux acteurs:
Commune des Voivres
Communauté de Communes Val de Vôge (désormais Communauté d’Agglomération d’Epinal)
PETR Epinal cœur des Vosges
Moyens mis en œuvre:
# 15 logements communaux
# 14 contrats pour l’insertion par l’activité économique
# Réhabilitation de l’étang Lallemand
#Création de la ferme aquacole «L’aquaculturedici» - Création de la structure d’éducation à l’environnement «l’eaudici» - Création du centre d’accueil touristique «la maisondici» - Construction de «l’abridici»
# Création d’une couveuse d’entreprises au sein du dispositif Pôle d’Excellence Rurale
Porteur de projet:
MAIRIE LES VOIVRES
Code postal:
88240
LES VOIVRES
Personne à contacter:
Michel FOURNIER - mairie.lesvoivres@orange.fr